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02.06.2002
Coach en Afrique, un métier à court terme
Une consommation abondante des entraîneurs est une des caractéristiques des équipes nationales africaines
Si on fait une moyenne avec les formations présentes en Asie, on peut considérer que l`entraîneur d`une équipe nationale africaine a une espérance de carrière de six mois.
ETIENNE PAIROUX
La volonté d`un travail à long terme n`existe pas vraiment dans le football africain. C`est le règne du résultat immédiat, de la performance à court terme. Pour s`en convaincre, il suffit de compter le nombre de joueurs utilisés par les équipes nationales de ce continent lors des qualifications à la Coupe d`Afrique des nations (CAN) - le record est détenu par la RD Congo avec 51 joueurs et six entraîneurs alignés en deux ans ! - ou à la Coupe du monde. Mais on peut aussi s`éviter ce fastidieux calcul en se concentrant uniquement sur le sort réservé aux entraîneurs !
Ce métier est certainement l`un des moins stables de ce continent. En deux ans, les cinq pays africains qualifiés pour le Mondial ont consommé 17 coachs : quatre pour le Cameroun, le Nigeria et la Tunisie, trois pour l`Afrique du Sud et deux pour le Sénégal.
Une compétition loupée et l`entraîneur peut aller voir ailleurs. Ce fut le cas récemment après la Coupe d`Afrique des nations qui s`est déroulée entre janvier et février 2002 au Mali. Le Nigeria, pourtant troisième de l`épreuve, la Tunisie et l`Afrique du Sud ont remercié leur coach après la CAN. Un manque de résultats eu égard aux espérances, et voilà la Coupe du monde en péril. Donc un changement d`entraîneur puisque la volonté première est de briller en Asie. Pour les Africains, le Mondial, c`est une équipe, une nation et un continent.
Depuis quelques années, plusieurs pays rêvent d`avoir un grand entraîneur doté d`une expérience du haut niveau. Mais le principal obstacle, de leur point de vue, est d`ordre financier.
De l`autre côté de la barrière, rares sont les grands entraîneurs qui acceptent de composer avec les coutumes en vigueur dans ces pays où l`implication des hommes politiques ou des ministères du Sport est plus grande qu`ailleurs. Sans parler, parfois, de la pression mise par les joueurs eux-mêmes sur leur propre entraîneur.
Le cas de Shabiu Amodu en est l`exemple type. L`entraîneur du Nigeria a été remercié (avec ses adjoints, dont Stephen Keshi) par d`autres instances dirigeantes que celle de sa fédération après avoir été pourtant le premier Nigérian à qualifier son pays pour la Coupe du monde. Il était sous le contrôle de ses adjoints et de certains joueurs, expliquait l`un de ces derniers après l`éviction de son coach. Certains décidaient de qui seraient ou non de la partie. Et ceux agissant de la sorte étaient généralement des éléments se battant pour leur place dans leur club.
Au Cameroun, la meilleure équipe africaine actuelle, la situation est différente. Depuis septembre 2001, Winfried Schäffer est le 28e entraîneur des « Lions indomptables », mais aussi le 14e consommé par la Fédération camerounaise (Fecafoot) depuis 1990. Pourtant des hommes comme Henri Depireux ou Henri Michel sont passés par là.
Cette année, les « Lions indomptables » rêvent d`être les prédateurs redoutés au Mondial. Avec l`aide du deuxième entraîneur allemand de l`histoire nationale du Cameroun. Si la Fecafoot avait prospecté auprès de douze techniciens européens pour prendre le relais de l`intérimaire Robert Corfou qui avait succédé à Pierre Lechantre limogé lui-même en juin 2001, une bonne raison l`a sans doute poussé à s`orienter vers l`Allemagne. Dans le cadre du Projet Méridien établissant un partenariat entre les fédérations camerounaise et allemande, c`est cette dernière qui a pris en charge les 245 millions CFA (400.000 euros) que coûtent Schäfer et son préparateur physique, engagés tous deux jusqu`en juin 2002.
A l`heure où les pays africains veulent de plus en plus impliquer des coachs nationaux à la direction de leur équipe représentative (à la dernière CAN, la moitié des entraîneurs étaient africains), la situation des deux derniers finalistes de la Coupe d`Afrique des nations (un entraîneur allemand pour le Cameroun et un Français pour le Sénégal) et l`échec du Nigeria, de la Tunisie et de l`Afrique du Sud (tous avec des coachs nationaux) à cette même épreuve démontrent que les Européens ont encore de l`avenir sur le sol africain.·
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Hits: 1 | Source:Le Soir de Belgique | |
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