ACTUALITE |
20.04.2004
ETERNELLE IMPUNITE
Les Camerounais s`étranglent de rage. Leur seul et unique motif de joie est en grand péril : la qualification des Lions indomptables dans les prochaines compétitions continentale et mondiale. Plus un taxi, plus une gargotte où l’on ne s’insurge contre la légèreté des dirigeants du football camerounais qui ont cru bon, pour d’obscures raisons de “ partenariat ” dans une vulgaire affaire de publicité pour un équipementier, de compromettre la participation du Cameroun aux prochains tournois. Le sport règlera ses problèmes comme il le pourra. Des dirigeants du football seront, comme l’espère l’homme de la rue, appelés à s’expliquer sur ce qui s’est vraiment passé dans la préparation de la Can 2004 en Tunisie. Les citoyens quant à eux comparent déjà l’affaire Puma aux détournements de fonds liés à l’organisation de la 8ème coupe des nations, en 1972. Le pouvoir avait frappé fort en expédiant au trou de hauts fonctionnaires comme de petits revendeurs de billets et des hommes d’affaires. Priver un peuple habitué aux exploits sportifs de ses footballeurs comme d’une drogue nécessaire pour soulager les difficultés de la vie équivaut à une véritable trahison. Comme toujours, chez nous, le football a cette faculté magique d’occuper tout l’espace politique, culturel et social. Il constitue un de nos principaux repères en terme de valeur morale et éthique. Même si les compétitions passées ont connu chacune, derrière les paillettes de la gloire, le sombre revers des petites et grosses corruptions. Elles étaient bien tolérées puisque la compétition avait quand même lieu et l’on en tirait gloire et fierté. Les détournements de la coupe du Monde des Etats-Unis jusqu’au coup de cœur de tout un peuple datent seulement de dix ans. ¨Personne ne les a oubliés. La complicité de l’Etat dans ce coup d’arnaque au patriotisme des Camerounais laissa un goût amer à l’opinion. Les exploits des Lions ont converti toute la nation à ce sport. Parfois sans rien comprendre aux règles du jeu, on était heureux de leur grâce et de leur force, épatés que ce Cameroun tant décrié sur le terrain de la corruption fut admiré de partout dans cet extraordinaire village planétaire. Il est vrai que certains observateurs jugent ce football décidément tyrannique, qui éclipse toutes les crises que traverse le pays. S’en passer quelques années pour se concentrer sur les grands dossiers de la nation serait salutaire, disent-ils. Ainsi examinerait-on de plus près la cruciale question de la corruption et de la mauvaise gouvernance qui gangrène notre pays. Si les dirigeants du football ont cru bon de faire fi audesx règlements et de ne pas respecter la parole donnée, ils devaient sans nul doute compter sur une forme d’impunité qui leur aurait permis de continuer de rouler à vive allure sur le boulevard des fantaisies les plus folles d’un équipementier. Ce n’est pas qu’au Cameroun que les histoires de corruption autour du sport existent. On se souvient qu’il y a seulement quelques années, une cascade de scandales avait secoué le Comité olympique international sur les pots de vin versés par les pays qui se portaient à la candidature à l’organisation des Jeux olympiques, qu’ils soient d’hiver ou d’été. Des sanctions ont été alors prises soit pour radier les personnes qui avaient bénéficié de nombreux avantages des villes candidates, soit ces villes ont été écartées de la compétition. Dans tous les cas de figure, à l’échelle nationale aussi, on attend une réaction ferme qui dissuade tous ceux qui veulent profiter de l’impunité.
Henriette Ekwe
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