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Idris Carlos Kameni : « Il n’y a pas eu de joueurs désordonnés pendant le Mondial » (10.08.2010)
Dans un entretien exclusif au Jour, l’international camerounais reviens sur sa non-sélection pour le match amical de demain contre la Pologne, sur son implication supposée ou réelle dans le désordre chez les Lions pendant la Coupe du Monde, sur le « 1984 », etc.
Vous n’avez pas été appelé à prendre part au match amical de demain contre la Pologne. Cela fait longtemps qu’une telle chose ne vous était pas arrivée…
Oui, c’est vrai que ça fait longtemps. Je dirais 10 ans. Parce que depuis que je suis entré en équipe nationale A du Cameroun, en mai 2000, je n’avais jamais manqué une sélection. Mais, je pense qu’il faut respecter les choix d’un entraîneur. Il a décidé de ne pas m’appeler, c’est pour des raisons qui lui sont propres. Je les respecte.
Est-ce que cela vous choque ?
Je ne suis pas choqué. C’est toujours dur de ne pas être appelé. Tous les matchs sont importants, même lorsque ce ne sont que des matchs amicaux. Et quand vous n’êtes pas convoqué, cela peut gêner. Mais, on est dans le monde professionnel et on peut comprendre qu’on ne soit pas convoqué à un moment donné. C’est le choix de l’entraîneur.
Votre non-convocation intervient quand même aux lendemains d’une Coupe du Monde foireuse au cours de laquelle il y a eu beaucoup de bruits dans les vestiaires. Est-ce que vous considérez votre non-convocation comme une sanction qui ne dit pas son nom ?
Je n’utiliserai pas le terme sanction parce que je me demande pourquoi je serais sanctionné. De toutes les façons, je ne comprendrais pas. Je me réfère purement et simplement à des considérations footballistiques, c`est-à-dire aux choix d’un entraîneur. Pour sanctionner quelqu’un, il faudrait qu’il ait fait quelque chose de contraire aux règles de fonctionnement d’un groupe, ce qui n’est pas mon cas.
Vous êtes pourtant présenté comme l’un de ceux qui ont créé le désordre dans cette équipe…
C’est des rumeurs. Je voudrais dire que je respecte le travail des journalistes, mais je pense qu’ils ont pour rôle d’informer le peuple camerounais avec un peu d’honnêteté. Il ne faut pas diffuser des informations qui ne sont pas vérifiées. Il n’y a pas eu de joueurs désordonnés pendant le Mondial. Il y a eu un groupe qui s’est battu comme il a pu et cela n’a pas été positif. Arrêtons de chercher des boucs émissaires. J’ai entendu parler des clans et tout, c’est des conneries ! Il n’y a pas eu ce genre de choses.
L’entraîneur lui-même a reconnu qu’il a été débordé par les problèmes de cette équipe… ces problèmes existaient…
Pour être clair, je pense qu’il faut revoir l’entraîneur qui a parlé de ces problèmes pour qu’il dise lesquels. Et surtout, qu’il explique comment les choses ont été gérées. Il peut y avoir un malaise dans un groupe qui peut durer une minute, une heure, des fois moins, etc., il faut savoir comment gérer ça. Si cet entraîneur a constaté qu’il y avait des problèmes, qu’est-ce qu’il a fait pour les résoudre ? C’est ça la question.
On dit que vous étiez mort de rire sur le banc de touche quand on maltraitait les Lions sur le terrain…
C’est une information nouvelle. Moi j’avais entendu dire qu’il y avait des joueurs qui riaient, mais il n’y avait pas de nom. Celui qui a fait ces déclarations devrait en apporter les preuves. C’est dommage et déplorable que les gens puissent se comporter ainsi. J’ai entendu dire qu’il y a un responsable de la Com qui a fait ces déclarations que je trouve vraiment regrettables. Des propos de ce genre ne sont jamais justifiables et c’est dommage pour notre football et notre nation. Les gens qui ne vient pas vivre le groupe doivent avoir des informations justes et précises, malheureusement, on les abreuve d’informations erronées. C’est vraiment malsain.
Avez-vous refusé de jouer un match pendant la Coupe du Monde ?
Jamais. Jamais du tout ! Ça fait 10 ans que je suis dans cette équipe nationale du Cameroun et j’aime défendre les couleurs du Cameroun. C’est avec la même motivation que je réponds à toutes les convocations en équipe nationale. En 2006, j’ai été remplaçant pendant la Coupe d’Afrique des Nations et sans explication. J’ai gardé une attitude professionnelle et je me suis toujours entraîné jusqu’au bout. J’ai toujours animé le groupe comme j’ai pu. Nous avons passé un an avec un entraîneur qui est Paul Le Guen et je n’ai pas eu de problème. La seule fois où j’ai eu un entretien de plus de 15 minutes avec Paul Le Guen, c’était à Monaco, avant le match contre l’Italie. Je n’ai jamais été approché par qui que ce soit pour jouer un match et que je l’aie refusé. Etre considéré comme un rebelle, se sentir sali comme ça par je ne sais qui et pourquoi. Tout ce que je demande, c’est qu’on respecte mon silence et ma tranquillité.
Un site Internet affirme que vous accusez Samuel Eto’o d’être responsable de votre non convocation et que vous déplorez la trop grande mainmise du capitaine sur cette équipe. Vous le confirmez ?
Je ne peux pas confirmer des conneries pareilles ! Excusez-moi pour l’expression. C’est incroyable tout ça. Je ne sais pas qui est derrière tout ça. Je n’ai parlé avec personne. Vous avez certainement remarqué que je n’ai pas parlé il y a longtemps. Je ne l’ai pas fait avant le Mondial, ni pendant le Mondial et encore moins après. Les seules interviews que j’ai spécialement acceptées sont celles que je vous accorde et celle que j’ai accordée ce matin à vos confrères de Siantou. Je n’ai parlé à personne d’autre et je ne sais pas qui est derrière tout ça. Les gens doivent savoir que l’équipe nationale appartient à toute la nation et il faut la respecter, il faut faire attention. L’équipe nationale c’est un emblème et on ne s’amuse pas avec. Je n’ai pas été appelé en équipe nationale et je ne m’en prends à personne. C’est
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l’entraîneur qui fait ses choix. C’est comme en club. Quand je ne suis pas sélectionné, je ne demande rien à personne. Si je ne suis pas sélectionné, je ne demande des explications à personne. La vie continue.
Est-ce que le « 1984 » que vous connaissez très bien est encore soudé ?
On a souvent parlé d’un « 1984 » en équipe nationale. Il ne faut pas être sorcier pour savoir que le « 1 » c’est moi, le « 9 » c’est Samuel Eto’o, le « 8 » c’est Gérémi et le « 4 » c’est Rigo. Quand vous parlez de soudé, je pense que dans un groupe, quand les choses sont bien faites, ça se voit. Et quand ce n’est pas le cas, ça se voit aussi mais la vie de chacun suit son cours. On est appelé à quitter l’équipe nationale ou à continuer. Nous n’avons pas les mêmes trajectoires. Dans toutes les équipes du monde, il y a des affinités qui se créent entre certains joueurs plus qu’avec d’autres. On a souvent parlé d’un « 1984 » qui décidait à l’équipe nationale. C’est faux. Je ne pense pas que trois ou quatre personnes peuvent représenter en mal toute une nation. Tout ce que nous avons souvent fait, c’était pour le bien du Cameroun et cela a porté des fruits. Vous avez vu la belle ambiance qui régnait dans le groupe par le passé.
L’un des membres du « 1984 », Rigobert Song, a décidé d’arrêter sa carrière internationale. Comment avez-vous réagi en apprenant cette nouvelle ?
Je n’ai pas appris cette nouvelle par les médias. J’ai constamment parlé avec Rigobert au téléphone et je l’ai eu deux jours avant son voyage pour le Cameroun. Il était à Paris. Il m’a confié qu’il allait arrêter, nous en avons parlé longuement. Il laisse une longue carrière internationale derrière lui. L’amour et le respect des gens ne s’achètent pas. Rigo c’est un grand homme, c’est un Monsieur. Il a tout donné pour son pays et quand on l’appelle « Magnan », ça représente tout ce qu’il a fait en équipe nationale. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes ont pris Rigobert Song pour modèle. C’est important dans le métier que nous exerçons. Il est bien que des jeunes nous ressemblent. Ce qu’il a fait pour le Cameroun est inestimable ! Je continuerai à discuter avec lui au téléphone. Ce qui nous lie va au-delà du sport. En un mot, je dirais que Rigo c’est un Monsieur !
Espérez-vous revenir en équipe nationale ?
Je n’espère rien. Je ne souhaite rien. Je suis Camerounais comme beaucoup d’autres. Aujourd’hui, je n’ai pas été convoqué pour un match amical et comme je l’ai dit, c’est une décision qui n’engage que le sélectionneur. Je suis toujours prêt à défendre les couleurs de ce pays que j’aime tant, qui m’a beaucoup donné, beaucoup apporté. Si on fait appel à moi, je reviens avec plaisir. Aujourd’hui, en équipe nationale, après Eto’o, je suis le plus ancien. Mais je reste très discret et très professionnel, malgré toutes ces mauvaises langues qui se délient maintenant et je ne sais pas pourquoi. Chacun sait de quoi il est capable et de quoi il est responsable et après, notre rôle c’est de jouer.
Après 10 ans chez les Lions, qu’est-ce que cette équipe représente pour vous ?
Cette équipe représente beaucoup pour moi. J’en parle très souvent avec des gens qui ont arrêté comme Patrick [ndlr, Mboma] quand il vient nous voir pendant les stages. A un moment donné, l’équipe nationale c’est votre deuxième famille.
Comprenez, Idris, notre gêne au moment de vous poser cette question qui concerne votre vie privée. Quelqu’un à travers une radio de Yaoundé a affirmé que votre épouse a accouché d’un petit Blanc, ce qui veut dire en clair que vous avez été cocufié. Que répondez-vous à cela?
Quand j’ai entendu ça, j’ai rigolé. Je n’étais pas énervé. Avant de revenir sur cette affaire de mon enfant, je vais parler de notre élimination de la Coupe d’Afrique des Nations. Nous avons perdu un match contre l’Egypte et Carlos a pris un but des 35 mètres. A l’époque, j’ai critiqué le ballon et les gens ont dit que c’était juste un prétexte. Pendant la Coupe du Monde en Afrique du Sud, tous les gardiens s’en sont plaints. On m’a donc donné raison.
A cause donc de notre élimination à la Can, cela a tiré de partout. On a raconté que Kameni passait la nuit dans sa chambre avec une femme, etc. J’ai eu très mal. Parce que je suis un professionnel. Je ne fais pas ce genre de choses dans mon club et ce n’est pas en équipe nationale que je le ferais. Il y a une pression énorme quand on vient jouer en équipe nationale et si en plus on doit se livrer à ce genre de choses, on ne s’en sort pas. Notre hôtel était tellement sécurisé qu’il n’y avait pas d’étrangers. J’aurais aimé que celui qui a propagé une telle nouvelle dise dans quelle chambre tout ça s’est passé et comment cette personne a pu accéder à la chambre.
Et en ce qui concerne le gosse qui serait un petit Blanc…
Quand on joue la Can en février, mon gosse a déjà cinq mois et on raconte que mon épouse vient d’accoucher. C’est trop bête ! En plus, au mois de décembre, avant la Can, j’avais fait le baptême de mon fils au Cameroun. Donc, tout ça m’a fait rigoler, mon épouse avec. A l’heure où je vous parle, mon épouse et ma famille sont encore au Cameroun et les curieux qui veulent savoir la couleur du gosse peuvent aller voir. C’est déplorable qu’on en arrive à ce niveau de déclaration dans notre pays. En plus, c’est ma vie privée et ça ne regarde personne. En 10 ans, j’ai quand même apporté à mon pays et quand on me traite de la sorte, c’est quand même triste.
Où serez-vous demain quand les Lions seront en train de jouer contre la Pologne ?
Ça me gêne de le dire, mais je ne pourrai pas regarder le match parce que je serai en train de jouer un match amical contre le Sporting Rijon. A 20h, je serai moi-même sur le terrain. Mais qu’à cela ne tienne, je leur souhaite bonne chance et je souhaite que tout se passe bien.
Jean-Bruno Tagne
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