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Sébastien Bassong : « Je n’ai pas pris la place de Rigobert Song » (05.10.2009)
A 23 ans Sébastien Bassong, le défenseur de Tottenham parle de son intégration en équipe nationale.
Qui est Sébastien Bassong ?
Mes parents sont Raymond et Evelyne Bassong, ils sont nés et ont grandi au Cameroun et sont de l’ethnie bassa. Mes parents sont actuellement installés en France, mais font beaucoup de voyages au Cameroun, car ils sont très attachés à notre pays. Mon père est éducateur et professeur, ma mère travaille comme secrétaire dans une maison de loisirs.
Avez-vous été éduqué à l’Européenne?
Pas du tout ! Contrairement à ce que beaucoup de personnes peuvent penser, je suis né en France, mais j’ai reçu une éducation à l’africaine aussi dure que celle que reçoivent les jeunes camerounais au Cameroun. A la maison, c’était totalement une ambiance camerounaise. On mangeait le ndolè, les missole, les bobolos (ils prononcent les mots avec accent, ndlr) bref tout ce qu’on peut avoir comme bonne nourriture du pays.
Ils vous parlaient bassa vos parents?
Oui, surtout ma mère. Mais vous savez, on leur a fait croire que nous parler Bassa pouvait handicaper notre cursus scolaire. Heureusement, ils ont insisté et aujourd’hui je peux dire fièrement que je comprends et parle le Bassa. Me mpor bassa (rires)
Le football a-t-il toujours été une passion pour vous?
J’ai toujours eu envie de jouer au football. Vous savez en France comme au Cameroun, quand vous êtes tout petit et que vous sortez, la première envie c’est de taper dans un ballon. J’ai commencé à jouer dans mon quartier et c’est comme ça que j’ai intégré le centre de formation de Clairefontaine.
Justement, Clairefontaine est célèbre pour avoir formé de grands joueurs comme Henry, Gallas, ou Anelka ; comment y êtes-vous arrivé ?
Je jouais dans mon petit club au quartier. Ils m’ont repéré et ils m’ont demandé de passer des tests. Mon père m’amenait faire des tests tous les mercredis. J’ai passé 3 séries de tests et je me suis retrouvé là-bas.
Avez-vous pu continuer vos études ?
L’avantage à Clairefontaine, c’est qu’on a la possibilité d’aller à l’école. On va a l’école jusque dans l’après midi et ce n’est qu’après qu’on commence les entraînements. J’ai donc pu continuer à aller à l’école et ça s’est plutôt bien passé.
Où en êtes-vous arrivé ?
J’ai eu mon Baccalauréat Es avec beaucoup de difficultés, mais je l’ai eu.
Comment arrivez-vous au Fc Metz?
Clairefontaine est un centre prestigieux, donc il y a plusieurs recruteurs qui tournent autour et qui viennent superviser. J’ai signé à Metz parce que Metz m’a plu et a plu à mes parents. Il y avait un beau projet sportif et scolaire et mes parents insistaient beaucoup sur l’aspect scolaire.
Vous êtes resté cinq ans à Metz, mais vous n’avez pas vraiment progressé en France malgré votre énorme potentiel...
Dire que je n’ai pas progressé c’est quand même exagéré, j’ai passé tous les paliers et je suis devenu professionnel. Après vous savez dans une carrière de footballeur, il y a des moments où ça va plus vite et des moments où on a plus de mal à passer les paliers. J’ai eu la progression que je devais avoir et je ne suis pas mécontent de mon évolution
Quand vous jouez à Metz, on s’attend à ce que le prochain palier soit Marseille ou le Paris, mais vous êtes chez les anglais de Tottenham…
J’ai confiance en moi et j’ai une énorme foi en Dieu, je savais bien que si je jouais mon football en évitant de me mettre une pression inutile, les choses devaient bien se passer et c’est ce qui est arrivé
Vous restez une année à Newcastle (2008) et vous faites une grosse saison. Donnez-nous le secret de votre réussite?
Si c’était un secret, je ne vous le dirais pas (rires). Non c’est l’abnégation, beaucoup de travail et la prière. J’ai beaucoup travaillé. Je voulais me faire un nom, montrer mes qualités et mon potentiel. J’avais totalement conscience du fait que c’était une situation où personne ne me connaissait, ça pouvait prendre un peu de temps. Mais quand j’ai vu que je me sentais bien, je me suis dit pourquoi pas pousser un peu plus loin et s’imposer le plus rapidement possible ? Je ne me suis pas posé trop de questions, j’ai travaillé même quand c’était difficile et grâce à Dieu le travail a porté ses fruits.
En dépit de votre très bonne saison à Newcastle l’année dernière, ce club n’a pas pu se maintenir en Premier League. Qu’est ce qui s’est passé pour qu’un si grand club se retrouve si bas?
Si on pouvait comprendre ce qui s’est passé, on aurait tout fait pour l’éviter. Mais je pense que c’était une accumulation d’erreurs depuis un certain temps; et vous savez à force de tirer sur la corde, elle lâche. C’est un grand club et ça me fait de la peine de les voir jouer en 2ème division. J’espère qu’ils vont remonter le plus rapidement possible.
Vous avez fait forte impression dès votre arrivée chez les Spurs. Quelle ambiance avez-vous trouvé à Tottenham ?
C’est un grand club avec de très grands joueurs et un public très fervent, les gens m’ont bien accueilli et tout ceci a facilité mon intégration.
Comment avez-vous ressenti le fait de marquer d’entrée contre Liverpool ?
Ce fut une sensation étrange, je n’étais même pas sûr que le but avait été accordé parce que je n’ai pas l’habitude de marquer. De marquer dès mon premier match et de donner la victoire à mon équipe, c’était une grande joie pour moi et pour toute ma famille.
Quels sont les objectifs de votre club cette saison?
Nous voulons faire une bonne saison, être régulier et terminer le plus haut possible, pourquoi pas accrocher une place qualificative en Champions League.
Quelle relation avez-vous avec le manager Harry Redknapp?
J’ai une bonne relation avec lui.
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C’est un manager assez cool, très compréhensif et très exigent aussi. Il aime des gens avec du caractère, il sait bien nous contrôler et sait nous donner le tonus dont nous avons besoin pour avancer. Il a une grande réputation et je suis content de travailler avec lui.
Benoît Assou Ekotto, votre compatriote et coéquipier est un garçon assez difficile à cerner. Comment vous entendez-vous avec lui?
(Rires) Ben, je m’entends bien avec lui. Vous savez, chacun a son caractère. On joue dans la même équipe et en sélection et il n y a pas de raison que ça ne marche pas entre nous.
Vous avez été convoqué deux fois chez les espoirs français. Est-ce que à un moment vous-vous êtes dit que ce serait la France plutôt que le Cameroun?
Je suis né en France, j’ai grandi en France et j’ai été forme en France. Je dois quand même beaucoup à ce pays. J’ai été appelé et j’ai joué plusieurs fois avec les espoirs français, mais quand il a fallu faire un choix pour l’équipe A, le choix du coeur a prévalu et c’était le Cameroun. J’ai pris une décision et quand tu prends la prend ainsi, tu dois peser le pour et le contre, regarder le côté sportif et d’autres aspects. Mais, c’est vrai que dans ma tête mon choix était déjà fait
On peut aussi dire que vous avez choisi le Cameroun parce que là au moins vous êtes sûr de jouer, ce qui n’est pas forcément le cas si vous aviez choisi la France.
Pas du tout. Même si j’étais sûr de jouer pour la France, je n’y serai pas allé. Quand on parle d’équipe nationale, si ton cœur n’y est pas tu n’es pas à l’aise. Ce n’est pas une question de jouer ou pas; même si je n’ai pas de place chez les Lions, je serai toujours avec le Cameroun. C’est une question de coeur. Quand tu chantes l’hymne de ton pays, ce que tu ressens, il n’y a rien de comparable.
Parlant d’hymne national certains journalistes camerounais vous ont récemment demandé si vous saviez chanter le Ô Cameroun et tu as mal pris la chose?
Ce n’est pas que je l’ai mal prise, mais vous savez, c’est assez culotté de poser la question à un camerounais de savoir s’il connaît son hymne. Je n’ai rien à prouver à ces personnes qui me posent ce genre de questions. Je sais qui je suis, je sais d’où je viens. Si des gens en doutent c’est leur problème…
Comment avez-vous été accueilli chez les Lions?
J’ai trouvé une bonne ambiance, comme je l’imaginais, encore mieux même. Vous savez, on raconte beaucoup de choses autour de notre équipe. Il y a beaucoup de rumeurs, de « kongossa » comme on dit au pays, mais l’ambiance est très familiale et c’est ce qui fait notre force.
Vous n’avez pas pu jouer devant votre public à Yaoundé parce que blessé au Gabon. Etait-ce une déception ?
Ne pas pouvoir jouer à Mfandena, ça m’a fait mal au cœur, parce que j’attendais ce moment-là avec impatience. Mais vous savez, tout ce que Dieu fait est bon, je ne me suis pas pris la tête plus que ça. Le jour où je devrai jouer devant notre public je jouerai. Ça va venir tôt ou tard.
Vous êtes considéré comme un titulaire potentiel à la place de Rigobert Song. Qu’est ce que ça vous fait d’avoir pris la place du capitaine emblématique des Lions Indomptables?
Je n’ai pris la place de personne. On a un coach qui fait ses choix et qui aligne l’équipe qu’il juge la meilleure. Si je suis dans le onze, tant mieux. Je donne le maximum et si je n’y suis pas, ce n’est pas grave. Mais, je ne crois pas avoir pris la place de qui que ce soit.
Quels rapports entretenez-vous avec Rigobert Song?
On a de très bons rapports. Ce sont des rapports grand-frère petit-frère. Il me conseille beaucoup et me parle…
L’avez-vous senti déçu de ne pas jouer?
Chaque footballeur qui ne commence pas un match doit être déçu, car on est tous des compétiteurs. Si demain, je ne joue pas je serai forcément déçu, parce que j’ai envie de jouer, j’ai envie d’apporter ce que j’ai de meilleur pour l’équipe, c’est normal.
Il se dit que depuis que vous avez pris la place de Rigo, vous êtes tout le temps blessé …
Décidément, c’est une petite nature chez nous. Bon, c’est vrai que j’ai eu quelques blessures ces derniers temps, mais moi je m’en remet complètement à Dieu. Je prie. En Afrique on parle beaucoup de magie. Ça fait partie des mythes, mais je n’y prête pas trop attention.
Samuel Eto’o se pose comme le leader de cette équipe. Est-ce que c’est ce que vous vivez dans le groupe?
Oui, c’est ce que je vis. C’est le nouveau capitaine et il a beaucoup plus de responsabilités. Je pense qu’il les assume bien et peut être qu’il en avait besoin aussi. C’est un leader comme Gérémi ou Carlos (Kameni, ndlr) …
Est-ce qu’il ne joue pas trop la star?
Il ne joue pas à la star. Il est une star internationale et compte tenu de son statut, il est mis en avant par rapport à d’autres, mais il n’en fait pas trop. Il n’en profite pas trop. Il n’en fait pas plus que de raison.
Maintenant que vous avez repris la tête du groupe. Qu’est-ce qu’il ne faudrait pas faire pour manquer la qualification en coupe du monde?
Déjà, il ne faut même pas penser que l’on ne va pas y aller, surtout, il ne faut pas penser qu’on y est déjà et s’endormir sur nos lauriers et se laisser aller. On est sur une bonne dynamique et à nous de rester concentrés, de travailler, de garder cette rigueur pour aller en Afrique du Sud.
Sur quoi va se jouer le match de dimanche face au Togo ?
Comme toute rencontre de haut niveau, ça va se jouer sur des détails : si on joue à notre meilleur niveau et si on reste très concentrés, on y arrivera. Le football, il faut le jouer simple. Avec la qualité de joueurs que l’on a, on y arrivera sauf surprise.
Propos recueillis par
Hiondi Nkam IV, à Londres
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